Quand confronter? Quand recadrer?
Que faites-vous lorsque le comportement d'un collaborateur ne convient pas?
- Prenez-vous sur vous en pensant "Ce n'est que la première fois, attendons de voir si cela se reproduit"?
- Prenez-vous sur vous en pensant "Ah, si seulement j'osais"?
- Prenez-vous sur vous en pensant "Ah, celui-là, il ne perd rien pour attendre!"?
- Foncez-vous le voir pour lui dire votre manière de penser?
- Consignez-vous le fait pour lui faire les différents feed-backs négatifs d'un coup par la suite?
- Attendez-vous de le croiser par hasard pour lui en parler?
- Comptez-vous glisser cette information "entre la soupe et les patates"?
- Quoi d'autre?
Les manières de réagir sont diverses et, tant qu'elles résolvent le problème en respect de chacun des protagonistes, elles peuvent convenir.
Dans tous les cas de figures, il est plus légitime, lorsque vous donnez un message négatif, que la personne ait eu connaissance au préalable, des attentes et règles à suivre. Sinon elle vous trouvera injuste, voire imprévisible. Autrement dit ...
Pour re-cadrer, il faut avant tout ... cadrer.
Et pour cadrer, il faut déterminer ses limites:
- Qu'attendez-vous de vos collaborateurs?
- Qu'est-ce qui vous est insupportable / qu'est-ce qui est inadmissible?
- Quelle est leur marge d'autonomie, dans laquelle ils peuvent faire des erreurs sans que cela ne vous porte un préjudice que vous ne pouvez supporter?
Une fois que ceci est clair pour vous, il s'agit de le communiquer. De manière générale, la plupart des personnes souhaitent bien faire leur travail. Quand les consignes sont claires, c'est juste ... plus facile pour elles!
Maintenant, imaginons une situation concrète:
Lors de la réunion mensuelle, l’un de vos collaborateurs est sorti à deux reprises pour répondre à un coup de téléphone « urgent ». Ce n’est pas habituel.
Que faites-vous?
Notre proposition est de vérifier le niveau de conscience qu'a le collaborateur quant au comportement qu'il vient d'avoir et puis, de réagir en conséquence. Cela donnerait par exemple:
Collaborateur conscient
- Marc, je viens te parler car tu es sorti à deux reprises de la réunion. Que s'est-il passé?
- Oui, je sais je suis vraiment désolé, j'ai déposé la petite à la crèche malgré qu'elle avait de la fièvre car je voulais participer à notre réunion mensuelle mais la crèche a appelé et je leur ai demandé de voir avec mon épouse mais ils m'ont encore rappelé et j'ai du sortir deux fois.
- Ah voilà, je comprends, merci pour l'explication.
Et comment va la petite, maintenant? Avez-vous trouvé une solution de garde?
Super pour ta motivation à venir à la réunion en tout cas!
Quand tu es sorti, et certainement parce que cela ne te ressemble pas, nous sommes demandé ce qu'il se passait et nous ne savions si nous devions t'attendre; voudras-tu nous prévenir en début de réunion si d'aventure cela devait se reproduire?
Merci et bon rétablissement à la petite, surtout!
Dans cet exemple, nous avons un collaborateur dont le niveau de conscience est présent, qui est motivé et se sent responsable des conséquences de ses actes. Comme la prise de conscience est déjà là, il ne sert à rien d'en rajouter une couche. Juste trouver des modalités acceptables pour tous. Vous avez fait preuve de compréhension et en même temps travaillé au cadre.
Collaborateur peu conscient
- Marc, je viens te parler car tu es sorti à deux reprises de la réunion. Que s'est-il passé?
- Ah rien de particulier, juste deux appels privés que je devais prendre, pourquoi?
- Est-ce que tu es conscient que ça a perturbé l’ensemble des participants et a obligé Jean-Luc à recommencer sa présentation ?
- Non, non, je n'avais pas réalisé cela... Je pensais que j'avais été assez bref et que cela était passé inaperçu. J'irai présenter mes excuses à Jean-Luc.
- Oui, c'est probablement important pour entretenir de bonnes relations, bonne idée. Et par rapport aux autres participants, peux-tu t'organiser pour prendre tes appels privés en dehors des temps de réunions?
- Oui, bien sur, c'était exceptionnel.
- Parfait. Et merci.
La prise de conscience des conséquences de ses actes n'était pas présente. Il a suffit de les nommer pour que le collaborateur réalise l'impact de son comportement et en prenne la responsabilité.
Collaborateur non conscient
- Marc, je viens te parler car tu es sorti à deux reprises de la réunion. Que s'est-il passé?
- Ah rien de particulier, juste deux appels privés que je devais prendre, pourquoi?
- Est-ce que tu es conscient que ça a perturbé l’ensemble des participants et a obligé Jean-Luc à recommencer sa présentation ?
- Mais enfin, ce ne sont quand même pas mes deux sorties qui ont posé problème! Je n'ai rien demandé à Jean-Luc, moi, j'aurais bien rattrapé le retard par la suite! On a quand même encore le droit d'avoir des urgences privées, non?
- Bien sur que des circonstances exceptionnelles nécessitent des actions exceptionnelles. Et, dans tous les cas, il s'agit d'assumer les conséquences. J'ai deux questions:
- Que comptes-tu faire par rapport à Jean-Luc et aux autres participants?
- Dans le futur, comment vois-tu la possibilité de respecter le bon déroulement de nos réunions?
La prise de conscience des conséquences de ses actes n'était pas présente et, même en les nommant, le collaborateur refuse de les reconnaitre et d'assumer. Le feedback devient un début de recadrage. A voir comment le collaborateur évolue au fur et à mesure de la conversation. L'idée est d'ajuster son comportement au niveau de conscience.
Prenons maintenant un cas aux conséquences plus importantes.
L’un de vos proches collaborateurs devait vous remettre hier soir, avant 17 heures, un rapport que vous deviez présenter ce matin, lors de la réunion du comité de direction. Vous n’avez pas reçu ce rapport, votre collaborateur était injoignable et vous avez été obligé de postposer cette présentation, ce qui vous a mis dans une situation pour le moins délicate.
Que faites-vous?
Ici, quelles que soient les raisons du comportement, il est nécessaire de marquer le coup par rapport aux conséquences (et bien sur qu'aucune règle n'est valable dans tous les cas). Voici un exemple:
- Marc, j'ai demandé à te parler. Je tiens à souligner l’importance de cette discussion.
J'ai coupé mon portable et demandé qu'on ne nous dérange pas et te demanderai de couper le tien également. Merci. - Marc, es-tu d’accord que nous devons tout mettre en œuvre pour respecter les engagements pris?
Marc: "Euh, ... oui." - J’attendais un rapport de ta part pour hier soir avant 17 heures. Je ne l’ai pas reçu. Tu étais injoignable et ce matin, j’ai dû postposer cette présentation au comité de direction.
- Quand vais-je recevoir ce rapport et quel engagement prends-tu pour qu’une telle situation ne se reproduise pas ?
Dans cet exemple, il s'agit ici de se donner les moyens que la personne comprenne que ses actes ne doivent pas se reproduire. Il n'y a pas de place pour les raisons du pourquoi du comment à ce stade. L'ambiance et le climat doivent être cohérents avec le ton de la discussion. Vous restez pro, correct, humain. Et ferme.
Ensuite, vous rappelez le principe général qui est mis à mal avec un tel comportement. Vous vérifiez s'il est toujours prêt à le respecter. S'il ne l'est plus, vous avez tous les deux un plus grave problème. S'il l'est, il s'agit de lui faire prendre conscience du fait que ce comportement n'est pas cohérent avec ce principe.
Enfin, vous avez besoin du rapport mais également la confiance que les moyens mis en oeuvre pour éviter que cela se reproduise soient suffisants. Tant mieux si la personne réalise son erreur, c'est bon signe. Tant mieux si la personne est désolée, c'est prometteur pour le futur. Cela ne change pas l'impact de son comportement ni le besoin de sécuriser que cela ne se reproduise pas.
On le voit, ce n'est pas le même type de discussion et j'imagine que de nombreux lecteurs soient mal à l'aise avec le deuxième scénario. Si c'est le cas, réfléchissez aux conséquences si la personne devait recommencer car elle ne perçoit pas l'importance ou bien si chacun de vos collaborateurs faisait cela une fois par an, chacun pour une bonne raison (à leurs yeux).
Chaque cas est particulier. N'hésitez pas à consulter nos formations voire à faire appel à So Essential pour créer votre académie interne pour les softs skills.